Les littoraux de l’Est du Mexique subissent régulièrement des échouements massifs, qui pèsent fortement sur l’économie de la région. Les activités touristiques sont une priorité pour les autorités locales qui déploient des moyens importants pour nettoyer les plages méconnaissables. Le pays possède des équipements variés pour répondre aux arrivées de sargasses, mais les surfaces envahies sont parfois considérables. Plusieurs perspectives de valorisation existent sur le territoire, qui pourraient contribuer à l’économie mexicaine de manière significative.
Situation actuelle au Mexique
La zone du Mexique la plus exposée aux sargasses est l’Etat de Quintana Roo, à l’Est du pays. Avec ses 900 kilomètres de littoral, les quantités de sargasses échouées peuvent atteindre jusqu’à 3 000 mètres cube par kilomètre carré (mai 2018). L’État de Yucatán, situé dans le Golfe du Mexique et frontalier avec l’État du Quintana Roo, est également impacté. Ces zones sont particulièrement sensibles aux échouements de sargasses car elles concentrent des complexes touristiques très prisés à l’échelle mondiale, ainsi que des écosystèmes marins fragiles.
Conséquences des sargasses sur les activités Mexicaines
Le tourisme représente 80% des activités économiques du Quintana Roo. L’attractivité de l’Etat repose notamment sur ses plages de sable blanc et ses eaux turquoises où se trouvent de nombreux récifs coralliens, associés à une faune riche. Ce sont principalement ces atouts qui souffrent le plus de l’arrivée des sargasses.
Une étude de 2019 (“Faunal mortality associated with massive beaching and decomposition of pelagic Sargassum”, Rodríguez-Martínez et al.) a démontré que 24 espèces de coraux présentes dans les eaux mexicaines étaient atteintes de la maladie de perte de tissus corallien. Cette maladie peut apparaître à la suite d’une modification physico-chimique des eaux. Les sargasses pourraient être à l’origine de ces perturbations car elles agissent sur de nombreux paramètres : la quantité de lumière qui traverse la surface est diminuée, la température de l’eau ainsi que son pH sont modifiés, de nouvelles espèces vivant dans les bancs d’algues brunes sont importées. Ce cas n’est qu’un exemple d’impact écologique des sargasses, qui augmentent également la mortalité chez plusieurs dizaines d’espèces de poissons et de crustacés.
Sur terre, les plages se retrouvent couvertes par des centaines de mètres cubes d’algues, rendant l’air difficile à respirer et l’accès à l’eau parfois impossible. Les algues charrient du sable dans la mer et érodent les côtes. Elles peuvent également libérer des substances nocives pour l’environnement, comme des métaux, dans le sol.
Le nettoyage des plages avec des engins lourds, notamment lors des échouements les plus importants, dégrade également les plages en emportant du sable et des végétaux. Cela participe à la diminution de la surface disponible pour les activités balnéaires, comme à Puerto Morelos où le trait de côte a reculé de 9 mètres entre 2014 et 2017.
Les coûts de nettoyage pour les communes et les hôtels se répercutent sur les prix pratiqués, et ces espaces prisés par les touristes voient leur fréquentation diminuer.
Gestion opérationnelle
L’objectif sur les côtes mexicaines est de maintenir les plages propres le plus rapidement possible. Plusieurs équipements de collecte sont répartis entre les communes, parmi lesquels des tracteurs, des barrages, du matériel de collecte manuelle et plusieurs embarcations.
Le SEMAR (Secrétariat à la Marine) coordonne les activités de ramassage et s’appuie sur un système d’information et d’analyses des écosystèmes marins côtiers, le SIMAR. Cet outil a été mis en place par la Commission Nationale pour la Connaissance et l’Utilisation de la Biodiversité (CONABIO). Ce système permet de combiner des données sur la présence de sargasses et sur l’état des écosystèmes marins côtiers, par exemple le suivi du blanchiment des coraux.
De son côté, la CONACYT (Conseil National de la Science et de la Technologie) se charge d’améliorer les connaissances scientifiques et techniques sur les sargasses afin de trouver les meilleures solutions (collecte, stockage, valorisation) de réponse au phénomène.
Perspectives de valorisation
Plusieurs études ont mis en avant les utilisations potentielles des sargasses et celles déjà pratiquées au Mexique, comme l’extraction de polysaccharides (glucides), le fourrage et les fertilisants, ou encore les matériaux de construction. L’entreprise Blue Green a notamment commercialisé des briques de sargasses, désormais bien connues dans les Caraïbes. La composition des algues brunes leur confère une certaine résistance pour un coût abordable.
Les volumes de sargasses échoués sur les côtes mexicaines représentent une opportunité qui pourrait, si les chaînes de valorisation se développent d’avantage, couvrir les frais de nettoyage et de collecte et fournir de nouvelles activités économiques sur le territoire.